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Sarah KHOUAIDJIA

Au service des politiques publiques sportives

Sarah KHOUAIDJIA s’est longtemps rêvée professeur de sport. Avec les politiques publiques sportives, elle s’est rendue compte qu’elle pouvait transmettre les valeurs et bienfaits du sport autrement que par l’enseignement : une révélation ! Elle revient sur son parcours « à fond la forme » de Décathlon au Conseil départemental de l’Essonne.

Petite, vous rêviez de faire quoi comme métier ?

Je rêvais toujours d’être professeur d’EPS ! Je n’aimais pas vraiment l’école. En grandissant, j’ai toujours pensé que le sport permettait de faire briller un élève autrement et de lui donner ainsi le goût de l’école ! J’ai donc intégré la Faculté des Sciences du Sport en voulant absolument devenir professeur de sport. J’ai donc obtenu une Licence « Education et motricité » et j’ai tenté le concours du CAPEPS (Certificat d'aptitude au professorat d'éducation physique et sportive) pour devenir professeur d’EPS… un concours que j’ai raté 3 fois à mon grand désespoir. Je me suis presque dit à l’époque « ma vie est finie » (rires).

 

Visiblement vous avez réussi autrement. Racontez-nous !

Durant ma Licence au sein de l’Université Paris-Saclay, j’étais très entourée. Pia-Caroline Hénaff-Pineau qui est une des professeurs qui me suivait m’a conseillé de regarder les Masters proposés par la Faculté des Sciences du Sport. J’ai passé un entretien pour intégrer le Master « Management du sport » mais j’étais dans une spirale très défaitiste et négative car j’avais raté le CAPEPS. Cela a sans doute été le pire entretien de ma vie (rires). Je me souviens encore du professeur (Dominique Charrier) me dire « Sarah, tu ne nous as pas du tout convaincu mais tu as du potentiel donc on va retenir ta candidature ».

 

Comment s’est passé votre Master alors ?

Finalement très bien (rires) ! J’avais toujours eu envie d’être professeur par goût de transmettre mais je me suis rendue compte que je pouvais transmettre autrement ! Le Master a été une vraie révélation car je me suis passionnée pour les politiques sportives avec la chance de pouvoir échanger avec de nombreux intervenants du monde professionnel.

J’ai réalisé mon stage de fin d’étude en travaillant dans l’évaluation des politiques publiques en participant au diagnostic des politiques sportives. Il s’agissait d’une étude comparative, à échelle nationale, organisée par l’Agence pour l’éducation par le sport, où l’on m’a confié la ville de Bezons dans le Val d’Oise (95). Je me souviens avoir pris conscience que mener une politique c’est aussi « transmettre ». La politique sportive d’une ville, correspond à ce que l’on veut transmettre en matière de sport aux habitants : c’est le choix des sports, les messages que l’on veut faire passer, les publics visés, le budget, les pratiques tarifaires, etc mais aussi la mesure des réussites et des échecs avec les actions à mettre en place en fonction.

 

Qu’avez-vous fait après le Master ?

J’avais envie de travailler en collectivité donc j’ai passé quelques entretiens mais je dois dire que je suis plutôt trépignante. J’avais très envie de travailler et d’être indépendante, je n’ai donc pas suivi mes professeurs qui me conseillaient d’attendre l’opportunité professionnelle la plus en adéquation avec ce que je voulais faire.

J’ai donc été recrutée chez Décathlon comme responsable des ventes. Le côté « sport » me plaisait beaucoup. On m’a rapidement fait confiance, ainsi j’ai pu manager des équipes jusqu’à 40 personnes en retrouvant notamment le plaisir de « transmettre ». Chez Décathlon chaque vendeur est considéré comme un éventuel futur manager, c’est une entreprise qui aime faire progresser grâce à la politique de formation interne. J’ai pu gagner en assurance sur de nombreux domaines de la communication à l’évaluation des collaborateurs.

Après Décathlon, j’ai rejoint H&M mais je ne me suis pas retrouvée chez ce géant du textile. J’ai perdu tout lien avec le sport !

 

Vous avez réussi à vous réorienter professionnellement pour retrouver l’univers des politiques publiques. Vous êtes une femme de conviction, il semblerait ?

Mon début de parcours comporte des atouts et des faiblesses. Mon expérience chez Décathlon a été très formatrice, j’ai gagné confiance en moi et intégré le management à mes compétences. Par contre cela a estampillé mon CV « commerce » ce qui est assez loin de l’univers des « politiques publiques ». Pourtant après une introspection sur moi-même, je me suis rendue compte que je voulais vraiment travailler dans ce domaine.

Dans une candidature, les expériences professionnelles comptent autant voire plus que la motivation. Je me suis donc retrouvée à candidater dans les collectivités territoriales sans jamais être recontactée ! J’ai décidé de travailler mon réseau parmi lequel celui de Paris-Saclay. Je me souviens d’avoir rappelé Dominique Charrier pour reconnaitre que j’aurais dû suivre son conseil et attendre vraiment l’opportunité professionnelle me correspondant ! Finalement le réseau m’a tendu la main et j’ai eu un entretien à la Mairie de Champigny-sur-Marne qui recherchait un directeur des politiques sportives.

 

Vous êtes donc devenue directrice des politiques sportives de la commune de Champigny-sur-Marne. C’est une très belle expérience ?

Mon CV a retenu l’attention de la Mairie, notamment pour la partie « commerce » justement car le poste intégrait une dimension de « gestionnaire ». Une vraie connivence s’est créée durant l’entretien, on m’a rappelé le soir même, j’ai sauté de joie. Ce poste a été un vrai challenge pour moi, moins pour le côté « direction » que « collectivités territoriales » étant donné que je venais du secteur privé… j’ai du tout apprendre du fonctionnement du public. J’ai pris beaucoup de plaisir à être sur ce poste. Petit à petit, j’ai quand même compris que je n’aimais pas le côté « politique politicienne ».

 

Enfin, vous n’aimez pas mais vous êtes quand même revenue à Paris-Saclay pour échanger sur ce sujet avec les étudiants en tant qu’intervenante ?

Vous avez raison ! C’est une dimension délicate dans un poste et j’ai eu envie de partager mon expérience avec les étudiants. Je suis donc intervenue et j’interviens toujours à Paris-Saclay, je présente mon parcours, mon poste, j’avais envie de « renvoyer l’ascenseur » à mon université. Mon cours s’intitule « gestion des ressources humaines et de la relation avec les élus ». Il faut que les étudiants comprennent que dans les collectivités territoriales il y a « le personnel, les administratifs » et « le politique, les élus » et il faut jongler avec les deux dans une sorte de « triangle stratégique ».

 

Désormais vous vous êtes au Conseil département de l’Essonne ?

Oui ! Je suis désormais responsable de l’animation de la politique sportive du département placée sous le directeur de la politique sportive. J’aime être dans l’opérationnel, je me sens beaucoup plus à ma place. J’ai laissé la dimension très politique à mon directeur (rires) ! J’œuvre dans le suivi des partenaires des 60 comités sportifs, autrement dit l’échelle départementale des fédérations. Actuellement, j’avance sur différentes thématiques parmi lesquelles : le sport scolaire et de manière plus générale le sport jeunesse, le sport et la santé, le sport féminin, le sport pour les personnes éloignées de la pratique sportive. J’interviens pour conseiller, monter et suivre les projets, communiquer, organiser et soutenir financièrement. Il peut y avoir de la stratégie mais elle n’est jamais « politique » à mon niveau. Nous avons organisé une coupe de foot féminine dans les communes du département qui a rassemblé lors de la journée de clôture plus de 800 jeunes. Cela a été une vraie satisfaction professionnelle portée par des clubs comme Fleury qui comptent plus de 300 licenciées parmi lesquelles des joueuses de D1.

 

Vous pensez que les femmes peuvent être exclues de certaines disciplines sportives ?

Non, je pense plutôt que les femmes peuvent s’exclure d’elles-mêmes. J’ai fait du tennis de table, nous étions deux filles seulement dans l’équipe, beaucoup d’autres avaient opté pour la gym. La mixité est aisée dans les sports individuels mais plus difficile dans les sports collectifs. Moi la première quand j’ai voulu faire du foot, je me suis demandée « les garçons vont ils me passer la balle ? », « Ne vont ils pas me trouver nulle ? ».

Au-delà des femmes, ce sont les parents qui peuvent aussi connaitre des difficultés dans l’accès à la pratique sportive. La politique sportive de la ville est là pour penser à bien avoir un vestiaire garçons et un vestiaire filles mais aussi des créneaux horaires sportifs correspondant à la vie de parents, des solutions de garderie, du sport parents-enfants ou encore du co-voiturage pour les personnes non véhiculées.

Interview de Sabine Ferrier, 
Chargée du réseau des diplômés de l’Université Paris-Saclay, 
Direction de la Formation et de la Réussite.