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Rémi Duchemin

Un chef d'entreprise passionné d'évènements sportifs

Passionné de sport, Rémi Duchemin voulait arrêter ses études après le Bac pour être moniteur de ski et professeur de golf. Il se laisse convaincre de tester une année en STAPS. Après un Master 2 réussi, il rejoint Amaury Sport Organisation. Quelques années plus tard, il fonde son entreprise ThirdPole qui n’a cessé de grandir devenant OC Sport.

Vous ne vouliez pas faire d’études supérieures mais vous êtes arrivé à la Faculté des Sciences du Sport, racontez-
nous ?

Jusqu’à l’année de mon BAC S, je n’étais pas certain de vouloir poursuivre mes études, j’avais toujours en tête d’être moniteur de ski l’hiver et professeur de golf l’été. Mes parents n’étaient pas contre mais ils m’ont quand même convaincu de tester une première année à l’université. Pour eux c’était important que je ne ferme aucune porte pour mon avenir professionnel.

J’ai décidé de suivre leur conseil mais en faisant des études connectées au sport ! La réponse a été STAPS où ma candidature a été retenue étant donné que j’étais un bon élève.

J’ai finalement poursuivi mes études avec une seconde année (DEUG équivalent L2) et l’idée d’éventuellement devenir professeur d’EPS. J’ai déchanté lors de mon stage pratique car je n’ai pas réussi à me projeter dans ce métier, du moins pas pendant 40 ans !

 

D’où vient cette vocation pour le management du sport ?

En fin de 2ème année, j’ai eu la chance de suivre les cours de Michel Desbordes et Bernard Corrand sur le management et le marketing sportif. J’ai tout de suite accroché et de ce fait j’ai rejoint la filière « Management du sport » en Licence puis « Management international des évènements sportifs » en Masters 1 & 2.  Cela a été une vraie révélation, nous étions alors juste après la Coupe du Monde 1998 et l’industrie du marketing sportif était en pleine structuration. Lors de ces 3 dernières années passées à Paris-Saclay, nous avons rencontré de nombreux intervenants professionnels très inspirants, et j’ai noué des relations d’amitié avec certains. Michel Desbordes reste l’un de mes meilleurs amis, 20 ans plus tard.

J’ai réalisé mon stage de fin d’études chez Carat Sport au département des Partenariats Médias, c’était assez nouveau à l’époque. J’avais notamment travaillé sur la préparation de la Route du Rhum 2002, pour le compte de la marque Bonduelle et son skipper Jean Le Cam. Le sponsoring est vraiment stratégique car il finance souvent une partie significative des évènements sportifs, et il est tout à fait possible de développer les revenus de sponsoring tout en préservant les valeurs fondamentales du sport et des athlètes.

 

Vous avez grandi professionnellement chez Amaury Sport Organisation (ASO) ?

Effectivement, j’ai enchaîné avec un second stage chez Amaury Sport Organisation qui, après quelques mois, m’a proposé un poste de Chef de Marché au sein du département Marketing Stratégique. J’y suis resté 3-4 ans et j’ai beaucoup appris. Mes missions consistaient à réaliser de nombreuses études (audience TV, satisfaction des participants, analyse d’image et de réputation, visibilité TV des partenaires, etc.) afin d’alimenter la société et les différentes directions en données qualitatives et quantitatives. Je me suis spécialisé dans le cyclisme et notamment le Tour de France qui est l’évènement phare d’ASO.

En 2006, Amaury Sport Organisation, très dépendant du Tour de France, a décidé d’accélérer sa diversification en créant notamment un service « Stratégie et Développement » dont j’ai pris la responsabilité. Nous étions rattachés à la Direction Générale et notre but était de mettre de nouveaux évènements sur orbite. Nous fonctionnions un peu comme une start-up interne avec pour chaque évènement envisagé : un concept sportif, une étude de marché, un business plan, la recherche de sponsors et de financements, un travail de formatage logistique, un plan marketing et communication. Si nous validions la création de l’évènement, nous l’accompagnions jusqu’à sa première édition ; ensuite l’évènement pérennisé était réinjecté dans l’organisation « classique » du groupe. Notre but était de faire émerger un évènement de l’étude de faisabilité au jour J. Cela été riche et instructif car j’ai découvert les 360 degrés d’un évènement sportif. J’ai plus particulièrement développé mes compétences en matière de développement stratégique et commercial.

 

Quels types d’évènements avez-vous mis en place à cette époque ?

Nous avons mis l’accent sur l’outdoor avec la création du Merrell Oxygen Challenge, ou encore sur les sports d’endurance avec la création de L’Etape de Légende. Le Merrell Oxygen Challenge était un grand rassemblement de sportifs outdoor qui se tenait au Lioran dans le Cantal, le temps du long week-end de l’Ascension, avec des épreuves trail, VTT et course d’orientation sur 4 jours et le partage d’un style de vie à la fois sportif, « healthy » et proche de la nature. L’Etape de Légende était un rendez-vous cycliste amateur sur une étape historique du Tour de France. La première édition organisée empruntait le même itinéraire que l’étape légendaire de 1967 remportée par Eddy Merckx entre Strasbourg et le Ballon d’Alsace.

 

Comment vous est venue l’envie d’entreprendre ?

 J’ai toujours eu envie de créer et d’entreprendre. En 2008, le PDG d’ASO Patrick Clerc a quitté le groupe. Il a toujours été mon mentor, quelqu’un dont je suis très proche en termes de vision et de convictions. Cela a impacté ma motivation et réveillé mon âme d’entrepreneur ! J’ai toujours eu le goût de l’initiative et de l’aventure, j’ai toujours aimé organiser et je m’étais dit que si je me lançais dans la création d’entreprise ce serait avant mes 30 ans. Certes à 40 ans on a davantage d’expérience et de réseau, mais à 30 ans on a encore plus d’énergie ! J’ai donc quitté ASO en 2009 afin de créer ThirdPole avec mon ami et associé Benjamin Chandelier, avec qui je travaillais déjà chez ASO.

 

Parlez-nous de l’aventure entrepreneuriale ThirdPole !

En quittant ASO sans ressource financière, nous avons du débuter notre activité par des missions de conseil, peu risquées et assez rémunératrices. Cela a été un changement radical, nous travaillions depuis chez nous, sans salaire pendant deux ans. Nous avons volontairement réduit notre train de vie afin de nous constituer des réserves permettant rapidement de faire évoluer le business model de ThirdPole. Dans le conseil, il n’y a pas de prise de risque au niveau financier, contrairement à l’organisation d’événements qui nécessite souvent d’avancer des fonds. Une de nos premières missions de conseil a porté sur l’organisation de la Coupe du Monde de biathlon (ski de fond et carabine) au Grand Bornant où nous avons accompagné les collectivités partenaires sur la communication, le marketing, le sponsoring ainsi que la gestion des bénévoles.

Mais très rapidement, disons après 12-18 mois, nous avons souhaité revenir sur l’organisation concrète d’évènements. Pour démarrer nous voulions trouver un évènement existant auquel nous pouvions donner un nouveau souffle. Nous avons alors repris le Marathon de Genève qui existait depuis 5 ans et rassemblait en moyenne 2 500 participants mais qui s’essoufflait en raison de sa structure 100% bénévole au sein de laquelle beaucoup de personnes connaissaient une carrière montante avec de moins en moins de temps à consacrer au marathon. Notre première édition en 2010 a rassemblé 2 500 participants, puis nous avons développé la course d’année en année. La 10ème édition en 2019 a rassemblé 20 000 personnes sur l’ensemble du week-end.

 

Finalement ThirdPole a été un succès car vous vous êtes agrandi en fusionnant avec OC Group ?

Avec OC Group nous étions complémentaires, eux leaders dans la voile et implantés en Angleterre, nous très actifs dans l’outdoor et l’endurance au cœur des Alpes suisses. OC Group était très développé et installé mais recherchait un second souffle en matière de créativité et de développement que ThirdPole pouvait alors leur apporter. Nous nous sommes tout d’abord mis à partager certaines ressources, notamment humaines, puis nous avons décidé de fusionner l’ensemble de nos activités. OC Group et ThirdPole sont devenus OC ThirdPole en 2010, puis OC Sport à partir de 2012. Mark Turner fondateur d’OC Group est devenu le Président et moi je suis devenu Directeur Général. Alors que nous comptions 6-7 salariés chez ThirdPole à cette époque, nous sommes passés à 30 collaborateurs avec ce rapprochement. Cela a été une expérience très enrichissante avec plus de 10 nationalités représentées en interne, donc autant de manière de travailler et de penser mais aussi beaucoup de créativité !

A partir de 2011-2012, OC Sport a vraiment décollé avec une importante phase de croissance et des évènements aux quatre coins du monde ! L’an dernier, nos équipes ont organisé 50 événements dans 16 pays différents, dont la Route du Rhum Destination Guadeloupe, et nous avons remporté la Volvo Ocean Race avec Dongfeng Race Team. En parallèle de la voile professionnelle, nous avons développé un circuit international de courses cyclistes pour amateurs (Haute Route Cycling Series), créé une Joint-venture (JV) avec les fondateurs de l’UTMB, ainsi que repris ou créé de nombreux événements de running et triathlon. OC Sport dispose dorénavant de bureaux permanents en Suisse, France, Angleterre, aux Etats-Unis et en Chine.

La nature de mes fonctions a fortement évolué en 10 ans. J’ai progressivement quitté les missions de conseil et la gestion des opérations événementielles afin de me consacrer à la stratégie, à la représentation de l’entreprise, aux relations avec les investisseurs. Et surtout j’ai accéléré le développement de l’entreprise à l’international.

 

Aujourd’hui coup de théâtre, vous avez démissionné d’OC Sport ?

J’ai pris la décision de quitter mes fonctions au 31 juillet dernier, c’est donc encore tout récent. En fait 2 mois après la création de ThirdPole naissait mon premier enfant et 4 ans après naissait mon second ! J’ai deux enfants de 6 et 10 ans que j’ai peu vu et le temps passe très vite ! J’ai pu connaitre des années avec plus de 250 jours hors de la maison et près de 100 destinations visitées ! J’ai donc été bien souvent loin de la maison. Comme je suis un homme qui aime les chiffres ronds et que j’ai désormais 40 ans, j’ai décidé de tourner une nouvelle page dans ma carrière qui sera désormais près des miens à Crans-Montana, en Suisse.

 

Vous pouvez nous en dire plus ?

C’est encore un peu tôt (rires) mais ne vous inquiétez pas je ne m’ennuie absolument pas. Avec mon épouse, nous avons investi dans quelques entreprises en lien avec le sport et le tourisme, que nous essayons d’accompagner au mieux. J’ai décidé de rester administrateur de l’Ultra-Trail du Mont-Blanc (UTMB) sur lequel j’ai beaucoup travaillé ces dernières années, notamment dans son développement à l’international (Chine, Oman, Argentine, etc.). Nous avons aussi plusieurs projets à Crans-Montana, où nous vivons depuis 10 ans, et en Provence, où nous aimons passer nos vacances. Mais la priorité sera désormais la famille !

 

Interview de Sabine Ferrier, 
Chargée du réseau des diplômés de l’Université Paris-Saclay, 
Direction de la Formation et de la Réussite.